Grâce à un programme de restauration financé par la Société des Amis de Versailles, le cabinet de la Méridienne, pièce intime située dans les Appartements privés de Marie-Antoinette, va retrouver, dès 2014, sa douceur aquarellée.
Avant d’être un musée, le château de Versailles fut une résidence royale, avec ses Grands Appartements d’apparat, sa succession de fastueux salons et d’imposantes galeries, mais aussi – et peut-être avant tout – avec ses espaces intimes, chambres et cabinets privés aux portes desquelles on laisse l’Étiquette et où la vie de cour peut, le temps d’un instant, être suspendue.
Dissimulé derrière la somptueuse chambre de la Reine, le cabinet de la Méridienne est par excellence l’un de ces lieux de « vie », un refuge contre les obligations de la couronne. Charmant, confiné et subtil, ce petit boudoir octogonal, qui offrait le confort d’un sofa de soie lilas niché dans une alcôve, accueillait le repos de Marie-Antoinette. Celle-ci pouvait même s’y enfermer grâce aux targettes intérieures, marquées de son chiffre « MA », qui doublent l’ouvrage de serrurerie. Dans cette pièce, l’intime se lit dans les moindres détails du décor. Imaginé par Richard Mique en 1781 alors que la reine allait donner un dauphin au royaume de France, le luxueux aménagement de la Méridienne met en scène le bonheur maternel et l’amour conjugal.
Œuvres du célèbre artisan Pierre Gouthière, les bronzes dorés sculptés qui parcourent les miroirs et les boiseries blanches réalisées par les frères Rousseau, représentent ainsi des dauphins, des roses, des cœurs percés d’un sceptre à fleurs de lys, ou encore des paons, attributs de Junon, la déesse du mariage. Le guéridon central, en bronze doré et au plateau en bois pétrifié, est un cadeau de l’archiduchesse Marie-Christine à sa sœur. Tout n’est ici qu’harmonie et finesse : le marbre griotte de la console rappelle celui de la cheminée, les deux fauteuils et la chaise en bois doré exécutés par le menuisier Georges Jacob qui reprennent les textiles de l’ottomane, tout comme l’ensemble des tissus d’ameublement.
Aujourd’hui, le charme du boudoir est intact. En effet, le décor de 1781 a, en grande partie, été épargné par la Révolution, puis par les transformations réalisées au Château par Louis-Philippe en vue de l’installation de son musée de l’Histoire de France. Toutefois, la dernière restauration d’envergure du cabinet remonte à plus d’un demi-siècle et les affres du temps commencent à ternir ce joyau du XVIIIe siècle : les boiseries se disjoignent, la dorure et les peintures ont perdu leur éclat. Ainsi, une restauration en profondeur et suivant les techniques traditionnelles sera entreprise dès l’automne. Dirigée par Frédéric Didier, architecte en chef des Monuments historiques, et par la Conservation du château de Versailles, elle redonnera toute sa splendeur à ce témoin de l’Histoire et de la vie privée de Marie-Antoinette. Dans un premier temps, le décor sera entièrement démonté afin d’être restauré en atelier dans un souci de conservation des éléments originels. Puis, au printemps, c’est l’ensemble des textiles qui sera renouvelé en accord avec leur état d’origine.
L’ancienne âme du lieu pourra alors à nouveau se révéler pleinement. Et avec un brin d’imagination, il ne sera sans doute pas impossible d’y surprendre le sommeil de la dernière reine de France, étendue sur sa méridienne.
Elsa Martin
Fondée en 1907 pour aider à l’entretien et à la reconstruction des châteaux de Versailles et de Trianon, la Société des Amis de Versailles a été créée à l’initiative de personnalités qui s’associent autour de Raymond Poincaré, alors président de la République. L’association compte aujourd’hui 7 000 membres. De nombreux mécènes (particuliers et entreprises) la soutiennent.