Aux intersections des principales allées des jardins de Versailles se trouvent les bassins des Saisons : au sud, les bassins des saisons froides, ceux de Bacchus et de Saturne, au nord, les bassins des saisons chaudes, ceux de Flore et de Cérès. Leur restauration, l’automne dernier, leur a redonné vie.
Côté sud, au bassin de Bacchus, les grappes de raisin, symbole de l’automne, ont repris leurs teintes mûres et violacées sous les pinceaux des restauratrices. Un peu plus loin, coquillages, éponges et anémones sont pris dans les glaces bleutées qui ceignent l’îlot de Saturne. Côté nord, face au bassin de Flore, gerbes de blé, coquelicots et bleuets ont retrouvé leur couleurs et prêtent leur moelleux aux flancs de Cérès. Dorés à la bronzine, dieux et putti accordent leurs chairs et leurs chevelures aux rayons du soleil.
Gilles Dupuis, responsable de l’atelier dont il a hérité de son grand-père, a retrouvé avec un plaisir évident ces bassins qu’il avait déjà restaurés, il y a plus de trente ans, en 1988. Régulièrement, il est intervenu pour donner des indications sur la valeur et les nuances des peintures, ou peint de sa main certains éléments du décor, comme ce beau crabe qu’il se réserve sur le bassin de Saturne.
Effleurant du doigt les sculptures, Gilles Dupuis explique : « Les décors des quatre bassins étaient recouverts de mousses, de traces noirâtres et d’algues. Nous les avons nettoyés puis remis en peinture. Nous avons composé notre palette en nous inspirant de l’iconographie réunie par Laurent Salomé, directeur du musée. Les teintes et leurs valeurs ont ainsi été choisies en cohérence avec la peinture du XVIIe siècle. Puis nous avons utilisé un vernis très résistant qui protège la couche picturale et les plombs. »
Son atelier, spécialisé dans la restauration de décors peints, connaît bien Versailles. Son histoire avec le Château a commencé avec le sauvetage, par Rockefeller, du hameau de la Reine en 1929 et s’est poursuivie avec des opérations prestigieuses, de la restauration de l’Opéra royal dans les années 1970 à celle, récente, de la maison de la Reine et du réchauffoir.
Commencé en mai 2019 et achevé l’automne dernier, le chantier d’entretien des bassins de Saturne, de Bacchus, de Flore et de Cérès a été mené par les équipes du Château en concertation avec l’Architecte en chef des monuments historiques Jacques Moulin (agence 2BDM). Régulièrement, tous se sont rendus sur place pour évaluer la mise en couleur des sculptures et apporter des nuances, documentation à l’appui.
Outre la remise en peinture, les bassins ont requis l’expertise des fontainiers pour la reprise de fissures, la soudure d’éléments de décors et la réfection de la faucille de Cérès. Quant aux marbres, ils ont été nettoyés à la vapeur d’eau par l’entreprise Chevalier. Iona Gabriel, du service de la Conservation architecturale qui coordonne l’opération, invite à admirer le résultat : « Depuis un point précis situé entre le bassin de Latone et le Tapis vert, une perspective surprenante permet d’embrasser les quatre saisons à travers ces quatre bassins . Allez-y ! »
Clotilde Nouailhat
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