magazine du château de versailles

Un serment
en deux temps II

La salle du Jeu de Paume, à Versailles, est désormais accessible au public tous les jours (sauf le lundi).  C’est notamment l’occasion d’apprécier la grande toile illustrant ce qui fit sa gloire : le célèbre serment du 20 juin 1789. Cette œuvre monumentale de Luc-Olivier Merson s’inspire d’un projet de David dont l’ébauche est conservée au château de Versailles.
De David à Merson, histoire d’une œuvre à quatre mains.

Serment du Jeu de Paume, par Luc-Olivier Merson, 1883, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon. © Château de Versailles, Dist. RMN / © Christophe Fouin

C’est sous la Troisième République et à l’approche du centenaire de la Révolution française que l’histoire du Serment suscite de nouveau l’intérêt. Dès 1880, le gouvernement de Jules Ferry cherche à concilier les Français autour d’une histoire commune. Quel autre événement aussi fédérateur que celui de la Révolution de 1789, qui vit le peuple se lever contre l’autorité royale absolutiste ? Quel autre symbole d’unité pour une république naissante, sinon celui du Serment du Jeu de Paume, prêté par les députés réunis pour la première fois en Assemblée nationale ?

Une vision antérieure du serment du Jeu de Paume, datant de 1834, gravure par Ary Scheffer (dessinateur) et Alfred Revel (graveur), musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, © Château de Versailles

Fédérer le peuple français

C’est dans cet esprit fédérateur qu’en 1880, le 14 juillet est retenu comme jour de fête nationale, que la Marseillaise, composée par Rouget de Lisle en 1792, devient l’hymne français, et que la salle du Jeu de Paume est choisie pour accueillir le premier musée de la Révolution française. La salle, inoccupée et presqu’abandonnée depuis 1789, doit être restaurée et réaménagée.
La question du décor amène le gouvernement Ferry à reprendre l’idée d’une immense toile commémorant le 20 juin 1789, envisagée en son temps par Jacques-Louis David. Le peintre Luc-Olivier Merson, alors surtout connu pour ses peintures religieuses, est choisi par le Ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts pour exécuter ce tableau « d’après l’ébauche du même maître ».

Un défi de taille

Un défi de taille attend Merson, que l’on charge de réaliser cette toile monumentale en moins de dix mois. L’artiste ne doit pas achever l’esquisse de David, mais réaliser une grande toile reprenant sa composition, jusque dans ses plus petits détails, et la gamme colorée en camaïeu de gris et de bruns de son dessin préparatoire.

Le serment du Jeu de Paume, 20 juin 1789, dessin préparatoire par Jacques-Louis David, 1791, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon, © Château de Versailles, Dist. RMN / © Jean-Marc Manaï

L’autre défi consiste en la transposition du dessin préparatoire (66 x 101 cm) aux dimensions de la toile voulue par David (7 x 10 m). Pour ce faire, Merson s’appuie sur une toute nouvelle technique, permettant le report d’un petit format sur une grande surface grâce… à une projection lumineuse ! Ce procédé « d’agrandissement à l’aide de projections optiques » inventé par M. Manuel-Perier reprend en réalité la technique ancestrale de la mise au carreau ; la rapidité d’exécution s’en trouve simplement améliorée.

Salle du Jeu de Paume à Versailles, restaurée et convertie en musée, par Charles-Henri Gosselin, 1883, musée national des châteaux de Versailles et de Trianon. © RMN-Grand Palais (Château de Versailles) / Gérard Blot

Merson termine de peindre sa toile quelques jours seulement avant l’inauguration du musée de la Révolution française. La toile, marouflée sur le mur de la salle historique, est présentée le 20 juin 1883, lors de l’inauguration, quatre-vingts quatorze ans jour pour jour après le Serment qui  symbolise pour tous aujourd’hui la chute de l’Ancien Régime.
La toile peinte par Merson d’après l’idée originale de David se trouve encore aujourd’hui dans la salle du Jeu de Paume : une histoire en deux temps pour une œuvre intemporelle.

Nejma Zegaoula,
cheffe de projets audiovisuels, service du développement numérique du château de Versailles

La toile de Luc-Olivier Merson au fond de la salle du Jeu de Paume. © EPV / Thomas Garnier


À SAVOIR

L’esquisse de David se trouve au dernier étage du château de Versailles, dans l’attique Chimay.
Elle sera accessible au public en visite libre lors de l’ouverture exceptionnelle des galeries de la Révolution, du 21 décembre 2024 au 5 janvier 2025.


À VOIR

La toile de Merson,
dans la salle du Jeu de Paume,
1, rue du Jeu de Paume, à Versailles.

Ouverte du mardi au dimanche de 12h30 à 17h30, sauf certains jours fériés.
Entrée gratuite, sans réservation, en visite libre.

Des visites guidées sont organisées par le château de Versailles, notamment : Versailles et la République et Le Jeu de Paume, de l’esquisse à la salle.
Information et réservation

Des visites guidées sont également possibles sur demande, selon la programmation de l’Office du Tourisme de Versailles.
Information et réservation


À ÉCOUTER

Le podcast sur la genèse de l’œuvre de Luc-Oliver Merson. 

 

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