Un petit tableau anonyme décrit, au passage de Louis XVIII, un instant de liesse, témoignant de son désir de revenir aux sources, et de l’accueil chaleureux qu’il y reçut. Une seule autre œuvre connue, le panorama de John Vanderlyn1, montre ainsi le frère de Louis XVI à Versailles.
On oublie trop souvent que Louis XVIII, lorsqu’il rentra en France en avril 1814, eut naturellement l’idée de s’installer à Versailles. Il y était né et y avait grandi, élevé en fils cadet de la Maison de France avant d’échapper à la Révolution par un exil qui dura plus de vingt ans. Arrivé à Paris le 3 mai, il lança immédiatement des projets pour la restauration du château et sa remise en état afin d’être habité. Le 10 août – date anniversaire symbolique de la fin de la monarchie d’Ancien Régime – il revint dans le palais de ses aïeux pour ce qui fut, à la fois, une vraie reprise en main et une visite des chantiers qui s’y déroulaient à marche forcée. L’émotion était à son comble, et le roi, venu parler de choses sérieuses, se laissa entraîner par la chaleur d’un accueil qu’il n’attendait plus. Les ouvriers lui firent fête tandis que la foule envahissait les jardins pour tenter de l’apercevoir et lui témoigner sa joie dans cette période de paix retrouvée.
Louis XVIII dans la galerie des Glaces
Un peintre était là, qui voulut fixer ce moment fugace. Il choisit la galerie des Glaces, lieu emblématique entre tous, dont la voûte était en restauration sous la direction de Louis Ducis et Charles Boulanger de Boisfremont. Il représente le roi debout, presque fringant, portant son éternel habit bleu lourd de décorations, acclamé depuis les échafaudages par les peintres. Les officiers de sa maison et les représentants des autorités civiles, religieuses et militaires font cercle autour de lui. L’œuvre est un témoignage unique des travaux de restauration, au début du XIXe siècle, de ces peintures exécutées par l’atelier de Le Brun, travaux qui n’étaient connus que par quelques mentions d’archives. D’un format modeste, mais d’une facture enlevée, elle est miraculeusement réapparue sur le marché de l’art, où elle a été repérée par un ami de Versailles qui l’a généreusement offerte au Château.
Frédéric Lacaille,
conservateur général au musée national des châteaux de Versailles et de Trianon
1 Panoramic View of the Palace and Gardens of Versailles, par J. Vanderlyn, 1818-19, conservé au Metropolitan Museum à New York.
Don de M. Franck Paquotte par l’intermédiaire de la Société des Amis de Versailles, 2021.
Article tiré des Carnets de Versailles n°21 (octobre 2022 – mars 2023)