magazine du château de versailles

Le château,
lieu de thérapie

Grâce à son espace Art et Éducation aménagé il y a trois ans dans l’aile du Midi, le château de Versailles peut accueillir de nouvelles formes de prise en charge des publics spécifiques. L’art-thérapie y est expérimentée depuis maintenant un an, notamment auprès de patients en service d’addictologie ou atteints de la maladie d’Alzheimer.

Entretien avec Nadine Amorim, art-thérapeute arts plastiques

Mélanie Bacquart : En 2019, vous avez mené une première démarche d’art-thérapie à la Fondation Louis Vuitton. Aujourd’hui, vous accompagnez des patients en addictologie au château de Versailles. Quel est l’intérêt d’agir hors les murs ?

NA : L’art-thérapie consiste en l’utilisation d’une pratique artistique à des fins psychothérapeutiques. Participer à des ateliers d’art-thérapie « hors les murs » permet à nos patients en addictologie de faire un pas de plus vers une certaine autonomie. Ils n’ont pas d’obligation de s’inscrire au programme. Il s’agit d’un engagement personnel sur un mois et demi durant lequel ils viennent chaque semaine, à la même heure, poursuivre leur travail psychothérapeutique. Cette démarche fait véritablement partie d’un soin, dans le prolongement de celui qu’ils ont débuté dans le service d’addictologie du Centre Hospitalier des Quatre Villes, à Sèvres.

Salle Vigée Le Brun. © Château de Versailles / C. Milet

MB : Vous installez vos groupes dans la salle Vigée Le Brun de l’espace Art et Éducation du château, situé dans l’aile du Midi. En quoi cet atelier diffère-t-il des autres ?

NA : Dans un atelier d’art-thérapie, le thérapeute cherche à créer un « espace intermédiaire d’expérience », au sens du psychanalyste D.W. Winnicott. C’est cet espace qui n’est ni à l’intérieur, ni à l’extérieur mais un entre-deux où l’enfant s’essaie à la symbolisation. Et c’est dans cet espace sécurisé qu’il est possible d’expérimenter en toute liberté la médiation. Ainsi, les patients peuvent entrer progressivement dans un processus de création pour arriver peu à peu, au fil des séances, à un processus d’assouplissement voire de transformation psychique. Travailler dans une institution muséale ou patrimoniale permet de renforcer la dimension symbolique de cet espace où l’on mène des ateliers d’art-thérapie. La Salle Vigée Le Brun est un lieu lumineux, contenant et sécurisant où tout est à disposition sans avoir besoin de circuler. C’est pourquoi cet espace est idéal pour accueillir nos ateliers.

Salles des Croisades. © Château de Versailles / T. Garnier

MB : Pourquoi déambuler dans des salles du Château avant de mener une séance ?

NA : Nous sommes à Versailles, un lieu de déambulation par excellence, où le cadre est indéniablement prestigieux et intime. L’équipe du secteur des publics spécifiques du Château nous ouvre les portes de salles qui ne sont pas accessibles habituellement, ou uniquement à des groupes guidés par des conférenciers : cela renforce la dimension exceptionnelle de cette première partie d’atelier et permet une renarcissisation (amélioration de leur estime de soi) de nos patients, qui est un de nos objectifs thérapeutiques. Par ailleurs, le fait d’être seuls permet d’assurer une certaine intimité, tant avec le groupe qu’avec le château de Versailles lui-même, et cela fait écho à l’enveloppe contenante et rassurante que nous cherchons à créer en atelier d’art-thérapie. Enfin, j’accompagne également des groupes France Alzheimer 92 au Château et le fait d’être entre nous, loin du brouhaha inhérent au flot des touristes, est essentiel. Nos malades sont très sensibles au bruit et à tout ce qui peut les désorienter.

MB : Quels espaces vos patients ont-ils préféré ?

NA : L’Opéra royal a fait l’unanimité, et ce, pour l’ensemble des groupes accompagnés. C’est un lieu fascinant qui a été une véritable source d’inspiration pour eux. Mais, en réalité, chacune des salles a quelque-chose d’unique, une atmosphère particulière qui a nourri esthétiquement et émotionnellement les patients avant de participer aux ateliers d’art-thérapie.

Propos recueillis par Mélanie Bacquart,
Responsable du secteur des publics spécifiques de la direction culturelle du château de Versailles.

Nadine Amorim – www.nadineamorim.fr


À VOIR ÉGALEMENT :

Visionnez la vidéo réalisée par l’Institut Rafaël lors d’un atelier mené par Agathe Leclercq, musicothérapeute et Viviane Seron, dramathérapeute dans la salle Lully de l’Espace Art et Éducation et dans la chapelle du Château.

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